Billets d'humeur (pour Ouest-France)

UN POINT, C’EST RIEN // L’humeur de Ladyblogue #16 pour Ouest-France

13 février 2013

« Un point, c’est rien »

C’est l’esprit fiévreux que je réfléchissais à ce billet, un dimanche en fin d’après-midi alors que toute ma tribu grippée dormait sur le canapé. Sur quoi allais-je écrire cette semaine ?

La Saint-Valentin ? Non, on va en bouffer assez comme ça. Et à contrario de la bonne pensée bobo qui se veut hostile envers la fête des amoureux, moi, en éternelle optimiste et positive, je ne suis pas contre, mais au contraire, tout contre. Mais le sujet ne m’inspirait pas. Pas là.

Je cherchais alors dans l’actu quelque chose qui pourrait m’animer. Mais nada. Que tchi. Zéro. Peau d’balle. La grippe avait raison de mon inspiration. Rien. Rien ne me venait.

C’est alors que la lumière fut, cette lumière qu’ont les braves lors de leurs délires.

Le rien.

Ecrire sur le rien.

Evidemment, ça peut paraître étrange parce qu’écrire sur rien signifie pour la plupart d’entre nous ne pas écrire du tout.

Mais la fièvre a cela de bon qu’elle permet des détours dans des chemins que l’on ose enfin.

Si le rien n’était rien, pourquoi alors continuerions-nous à l’utiliser comme nous l’utilisons ? (Pour ceux qui ont besoin, je vous laisse relire cette phrase une seconde fois.)

Le rien est toujours quelque chose. Que l’on fasse les choses en un rien de temps ou que l’on porte un pull un rien trop grand, le rien n’est pas rien. Il est ce petit quelque chose, certes pas très grand, qui fait toute la différence, qui change la donne, qui change l’instant d’après.

Pour rien au monde je voudrais que le rien devienne le vide.

J’aime trop ces riens, surtout quand ils sont tout petits, pratiquement invisibles. Lorsque nous devons faire des efforts pour les entr’apercevoir. C’est là qu’ils sont les plus délicieux, qu’ils se révèlent à nous.

J’aime ces « ce n’est rien » que l’on nous sourit les yeux baissés en nous offrant des fleurs. Il y a erreur, ce n’est pas vrai. Un bouquet de fleur n’est pas rien. Un bouquet de fleur, c’est un bouquet de fleur, avec des tiges, des feuilles, des pétales, des pigments, des odeurs, des noms en latin imprononçables. Et quoi de plus agréable que de se faire offrir un bouquet ?

Et parfois même, on le multiplie le rien… Oui, j’aime ce petit « pour trois fois rien » menteur qui nous déculpabilise d’avoir acheté une robe à plus de 200 euros. 200 euros, ce n’est pas trois fois rien… Car si rien est égal à zéro, trois fois zéro faisant zéro, elle valait vraiment le coup cette petite robe…

J’aime aussi ces « de rien » pudiques que l’on nous confesse, ces deux petits mots collés qui existent encore pour soulager notre timidité, notre confusion ou notre gêne. Ce duo condensé qui résume ces phrases oubliées que l’on n’ose plus se dire, de peur de. Ces remplaçants des « Je l’ai fait pour toi, parce que tu es mon ami de toujours » ou des « Garde-le, il te va beaucoup mieux à toi qu’à moi, tu es si belle avec ».

Un rien n’est pas rien du tout.

Un rien se savoure comme un tout.

« Tout ou rien » ne doit plus être un duel mais au contraire une alliance.

Un point c’est tout.

Un point c’est rien.

Facebook Comments
Please follow and like us:
Pin Share

You Might Also Like